Le but de la journée est d'observer le matin, en sous-bois clairs, des orchidées typiquement alpines et l'après-midi, dans un marais, diverses dactylorhizas.
Prospectez, prenez de la peine...
Le RV est fixé le matin à Cervières dans les Hautes Alpes, sous le col d'Izoard, vers 2200 m d'altitude. Ici comme ailleurs la floraison est en avance de deux à trois semaines sur la normale et on se demande s'il restera des fleurs photographiables.
D'emblée on peut constater, sur la première prairie arborée, que les orchis moucherons (Gymnadenia conopsea) sont moins abondants que d'habitude, mais heureusement il en reste, et que les nigritelles ont pratiquement disparu. Toutefois les dates de floraison de ces taxons étant très différentes on peut espérer trouver des hybrides “présentables“, facilement identifiables à leur labelle en position biaise voire horizontale, compromis entre le labelle tourné vers le haut de la nigritelle et celui tourné vers le bas de l'orchis moucheron.
Et effectivement dès les premiers pas on trouve un de ces hybrides. Mais là, nouvelle difficulté : du côté nigritelle a-t-on affaire à la nigritelle de Cornélie (G. corneliana) ou à l'orchis vanille alias nigritelle noire (G. rhellicani) ? Après concertation on est d'accord pour considérer que cet hybride de couleur fuchsia tirant sur le violet a pour parent la nigritelle noire alors que ceux qui ont pour ascendant la nigritelle de Cornélie sont plutôt rose pâle. Et de fait très vite on trouve de nombreux exemplaires de ces derniers.
Et les nigritelles alors ? Elles sont bien là, des deux espèces, disséminées au milieu des orchis miel (Pseudorchis albida) de la variété tricuspis, ce qui suscite la perplexité de certains : ont-ils déjà vu, comme M. Jourdain, sans le savoir, de véritables Pseudorchis non tricuspis ?
En prospectant bien une participante trouve un pied d'orchis globuleux (Traunsteinera globosa) tandis que d'autres au regard affuté dénichent des orchis grenouille (Coeloglossum viride) au labelle variant du vert au brun. En somme on trouve de tout mais en petites quantité (à l'exception de l'orchis moucheron).
Mais avant de quitter les lieux voilà qu'on découvre un tapis (le terme est peut-être un peu excessif) de nigritelles qui donne une idée de la richesse de la station en période humide. Elles sont là, toutes fraîches, magnifiques, à l'ombre des arbres dans ce qui a dû être une combe à neige laquelle les a maintenues au frais.
Encore un détour pour admirer de très beaux orchis moucheron blancs (G. conopsea var. albiflora) et c'est l'heure du déjeuner.
… et ne laissez nulle place où les yeux ne passent et repassent.
Repas, photo de groupe, et c'est le départ vers le marais du Bourget, toujours sur le territoire de la commune de Cervières, à 1850 m d'altitude, sur le cours de la Cerveyrette.
Il s'agit d'un rare marécage d'altitude de grande dimension (environ 2000 m sur 100 à 500 m suivant les sections) qui s'est constitué lorsque, il y a bien longtemps, le glacier descendant des cols de Péas et de Malrif a fondu provoquant un vaste glissement du versant qu'il soutenait.
Là comme ailleurs la chaleur a fait des siennes. Le marais est d'un vert presque uniforme, seule la parnassie des marais épanouie fait quelques taches blanches, et il faut se donner bien du mal pour voir le rouge des dactylorhizas. Mais quinze paires d'yeux bien ouverts finissent par trouver, au milieu de toutes les fleurs fanées parmi lesquelles quelques dactylorhizas alpestres (D. alpestris), de beaux exemplaires de l'orchis incarnat (D. incarnata) identifié sans hésitation. L'affaire est plus délicate s'agissant de tel spécimen avec ses feuilles longues et étroites dressées le long de la tige. Est-ce un exemplaire de dactylorhiza incarnat alors que la couleur brûlée des feuilles sur leurs deux faces en ferait un représentant de l'orchis rouge sang (D. cruenta) ? Cela mérite débat et le débat a lieu, à la fois ferme et courtois, jusqu'à ce qu'on apporte la “bible“ du regretté Bournerias. Il s'agit d'après elle du très rare orchis incarnat variété hyphaematodes . Plus loin subsistent quelques exemplaires de l'orchis rouge sang dont les feuilles nettement plus larges et rabattues permettent de voir la différence avec le taxon précédent.
En temps normal les hybrides sont très nombreux, voire majoritaires. Cette année on n'a guère vu que les formes “pures“, bizarrerie pour laquelle les plus savants trouveront bien une explication.
Enfin “last but not least“ L'orchis moucheron (D. conopsea) est présent bien-sûr mais sous sa variété densiflora qui affectionne les lieux humides, fleurit quand le type a pratiquement disparu et présente un nombre de fleurs très important ce qui explique son nom.
Au retour arrêt sous le col d'Izoard côté Arvieux pour admirer sur le talus de la route ces épipactis brun rouge (E. atrorubens), à feuilles écartées (E. distans) et à larges feuilles (E. helleborine) non fleuris dont certains en touffes de 8 à 10 pieds. À revoir dans dix jours.
Quelques photos prises durant la sortie :
Liste des taxons observés :
Coeloglossum viride
Dactylorhiza alpestris
Dactylorhiza cruenta
Dactylorhiza incarnata
Dactylorhiza incarnata var. hyphaematodes
Epipactis atrorubens
Epipactis distans
Epipactis helleborine
Gymnadenia conopsea
Gymnadenia conopsea var. densiflora
Gymnadenia corneliana
Gymnadenia corneliana var. bourneriasii
Gymnadenia rhellicani
Pseudorchis albida var. tricuspis
Traunsteinera globosa
Liste des participants ():
Pierre-Michel et Hélène Blais, Catherine Blais, Bruno Daviet, Christian et Mireille Fleury, René Foucher, Christian Grappe, Gérard Guillouard, Anne et Jean-Pierre Loux, Annie et Michel Pinaud,
Catherine et François Rolland
La traditionnelle photo de groupe :